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La Guinée nouvelle

Avis aux drogués de pouvoir !

Qui ose condamner le putsch survenu hier au Niger ? Qui ose s’élever contre cette intervention militaire dans un processus démocratique qui, depuis longtemps, a viré au cauchemar institutionnel, victime de l’aveuglement d’un homme arrivé au pouvoir par la grâce des urnes ?


Dommage ! Dommage qu’un militaire d’un grade si élevé et naguère si respecté de la troupe, se condamne à finir sa carrière comme un vulgaire petit monarque haï par la rue, victime d’une surconsommation de cette drogue dure qu’est le goût du pouvoir sans fin. Dommage que cet homme décrit comme affable, policé et rigoureux à qui il faut tout de même reconnaître la maestria d’avoir contraint le géant mondial Areva à relever sensiblement les cours de l’uranium acheté à son pays, en soit arrivé à cette extrémité qui le momifie dans le pire des wagons de l’histoire politique du Niger.


Au lieu de prendre la trajectoire prestigieuse d’un Thabo Mbeki ou d’un John Kufour, Mamadou Tandja aura préféré jusqu’au bout ne jamais se débarrasser des haillons de l’officier saltimbanque qui, finalement, n’avait de prise que sur des séides tout heureux de démontrer à la face du monde qu’il est possible d’être plus fort que le Droit et la Justice. Son entêtement l’a perdu. Et le Niger ne s’en portera pas plus mal en dépit du gâchis occasionné par tant de mois de luttes politiques avec la frange légitimiste de l’opposition démocratique. La restauration des institutions de l’Etat nigérien républicaines était une nécessité pour ce pays au risque de laisser éclore une dictature surdéterminée à se parer des oripeaux de la démocratie. Mais le coup de force des officiers légitimistes est salutaire.


Et maintenant ? A l’intention des autres chefs d’Etat tentés par la confiscation éternelle du pouvoir, il y a forcément une leçon à tirer de cette expérience nigérienne dont le continent se serait bien passé. Cette leçon, c’est une sorte de «doctrine Tandja» selon laquelle l’Armée reste le recours exceptionnel lorsque les mécanismes fonctionnalistes de la démocratie et de ses institutions sont corrompus par des pratiques anti-démocratiques avérées, des tripatouillages constitutionnels massifs et à durée indéterminée, les ruptures systématiques d’égalité et d’équité entre prétendants à l’exercice du pouvoir.


Malgré le drame représenté par cette intrusion militaire dans le jeu démocratique au Niger, l’on doit peut-être accepter que, en la matière, la démocratie a besoin, à son corps défendant, du concours de principes qui lui sont antinomiques pour perdurer. Entre intervention militaire et guerre civile, où aurait été le pire pour ce pauvre pays sahélien ?

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