3 Août 2012
Les ennuis français du fils du président équato-guinéen s’accumulent dans l’affaire des «biens mal acquis»: cible d’un mandat d’arrêt international, privé de ses grands crus et de ses voitures de luxe, Teodorin Obiang a vu son hôtel particulier parisien saisi mi-juillet.
Ce bâtiment de six étages, situé avenue Foch (Paris XVIème), d’une valeur de 100 à 150 millions d’euros, a été saisi le 19 juillet, a annoncé vendredi à l’AFP une source proche du dossier. Confirmée de source judiciaire, cette saisie a eu lieu quelques jours après l'émission d’un mandat d’arrêt international contre Teodorin Obiang, qui avait refusé de se présenter à une convocation.
Les juges, qui le soupçonnent d’avoir détourné des fonds publics de son pays, avaient en vain convoqué le fils de Teodoro Obiang Nguema à deux reprises en vue d’une mise en examen. L’ambassade de Guinée équatoriale en France n’avait pu être jointe vendredi soir.
Dans ce somptueux hôtel particulier de plusieurs milliers de mètres carrés accueillant notamment une boîte de nuit et un salon de coiffure, les juges avaient déjà saisi en février 200 m3 de biens de très grande valeur lors d’une perquisition hors normes qui avait duré dix jours et nécessité plusieurs camions.
Les enquêteurs étaient notamment partis avec des tableaux de maître, une horloge d’une valeur estimée à 3 millions d’euros, du mobilier de prestige et d’autres biens précieux, tels de grands vins (Petrus, Romanée-Conti...) coûtant plusieurs milliers d’euros la bouteille. En septembre 2011, la justice avait déjà privé Teodorin Obiang de onze bolides (Ferrari, Bugatti, etc.).
La Guinée équatoriale avait aussitôt alors exprimé sa «totale indignation» devant ce qu’elle estimait être une «illégitime persécution». Mais la famille Obiang avait été déboutée d’une procédure en référé intentée contre la saisie.
Après cette spectaculaire perquisition, les juges avaient convoqué une première fois en mars M. Obiang mais le gouvernement équato-guinéen s’y était opposé en signe de protestation.
Teodorin Obiang a été nommé fin mai deuxième vice-président de son pays après avoir exercé la fonction de ministre de l’Agriculture depuis 2008.
Selon son avocat, Emmanuel Marsigny, Teodorin Obiang bénéficie à ce titre d’une immunité, de même que l’hôtel particulier: «L’immeuble appartient à la Guinée équatoriale, c’est un immeuble d’Etat à usage diplomatique, la justice n’a pas du tout le droit de le saisir», a-t-il réagi vendredi.
Les juges enquêtent depuis décembre 2010 sur les conditions dans lesquelles trois chefs d’Etat africains - Denis Sassou Nguesso du Congo, Teodoro Obiang Nguema et le défunt président gabonais Omar Bongo Ondimba - ont acquis un important patrimoine immobilier et mobilier en France.
Les ONG Sherpa et Transparence International France sont à l’origine de la plainte qui a déclenché cette triple enquête.
L’enquête a récemment conduit les enquêteurs en Espagne pour interroger des propriétaires de sociétés forestières ayant dû fuir la Guinée équatoriale, qui auraient été ruinés par le paiement de commissions illégales à Teodorin Obiang en tant qu’ancien ministre de l’Agriculture.
Ce dernier est également visé par une plainte pour corruption aux Etats-Unis, où le département américain de la Justice (DOJ) le soupçonne d’avoir exigé le paiement de taxes de la part d’entreprises, et de détournement de fonds publics. Le DOJ cherche lui aussi à obtenir la saisie de biens sur le sol américain.