2 Juillet 2010
La Commission électorale de Guinée devait publier vendredi soir les résultats provisoires du premier tour de la présidentielle du 27 juin, attendus avec d'autant plus d'impatience que l'un des favoris, Cellou Dalein Diallo, a déjà affirmé être arrivé en tête.
Vingt-quatre candidats - tous civils - briguent la présidence de ce pays pauvre d'Afrique de l'Ouest, après un demi-siècle de dictatures.
Trois d'entre eux avaient été présentés comme les grands favoris : deux anciens Premiers ministres du général Lansana Conté (1958-1984) - Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré - et un opposant à tous les régimes successifs, Alpha Condé.
Evoquant des résultats partiels et provisoires collectés par son parti, M. Dalein Diallo a affirmé vendredi après-midi devant ses militants : "Nos efforts nont pas été vains, notre score est plus quhonorable puisque sur 100 électeurs, plus de 40 ont accordé leurs suffrages à votre candidat. Celui qui vient en seconde position est à 20% des suffrages exprimés".
"Mettons-nous à lesprit quil y a un second tour", a ajouté l'ancien chef de gouvernement, appelant ses militants à garder leur "sang froid".
La Commission électorale nationale indépendante (Céni) a normalement jusqu'à "vendredi au plus tard" pour publier les résultats provisoires de la présidentielle du 27 juin, la Cour suprême lui ayant accordé un délai en raisons de difficultés "logistiques" et "sécuritaires".
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"Serons-nous capable de donner les résultats vendredi? Nous disons oui", avait affirmé jeudi le président de la Céni. "Plus le temps passe, plus la fièvre monte et plus les risques sont grands par rapport à l'acceptation des résultats par les différents candidats", avait-il souligné, ajoutant : "l'économie est paralysée, les conditions d'existence se dégradent de plus en plus, donc nous n'avons pas le droit de retarder plus que ça" la publication.
Il avait par ailleurs annoncé que "beaucoup de cas de fraudes" avaient été enregistrés et des personnes "appréhendées et mises à la disposition de la justice" à Conakry et dans d'autres villes.
La suspicion s'était installée dès le lendemain du scrutin, qui s'était pourtant déroulé paisiblement et sans aucun incident.
Toute la semaine, la quasi-totalité des partis avaient dénoncé des "fraudes massives" et "bourrages d'urnes", ici ou là.
Ils s'accusaient les uns les autres d'avoir manipulé les résultats mais critiquaient aussi de façon virulente les membres de la Céni.
Le candidat Alpha Condé avait ainsi accusé le président de la Céni de manipulation des suffrages en faveur d'adversaires quil navait pas nommés.
"Le meilleur cadeau que la classe politique puisse faire au peuple de Guinée, c'est d'accepter les résultats, pour ne pas donner de prétexte à l'armée pour se maintenir au pouvoir, après 25 ans de régimes militaires", a souligné le coordinateur en Guinée de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme (Raddho), Mamadi Kaba.
La première présidence du "père de l'indépendance" (1958-1984), Ahmed Sékou Touré, s'était muée en dictature, faisant des dizaines de milliers de morts en 26 ans, selon les organisations de défense des droits humains.
Puis le pays avait connu les 24 années de régime militaire de l'autocrate Lansana Conté (1984-2008) et d'amères désillusions avec la junte dirigée par le capitaine Moussa Dadis Camara qui avait pris le pouvoir fin 2008. Le massacre de 156 opposants par l'armée, le 28 septembre 2009, à Conakry, a laissé le pays traumatisé.