5 Novembre 2011
La Guinée Conakry célébrait, le 1er novembre, le 53ème anniversaire de son armée nationale. L'événement, s'il n'a pas connu le faste des grands jours, conjoncture oblige, a tout de même été marqué par deux cadeaux présidentiels d'importance :
Le troisième geste qu'il s'apprête à faire à l'endroit de la grande muette sera, à n'en point douter, le moins apprécié de toutes ses marques de générosité : le professeur-président a annoncé, dans la foulée, sa décision de mettre d'office à la retraite plus de 4000 militaires et paramilitaires, et ce, d'ici la fin du mois de décembre 2011.
La mesure risque de faire grincer les dents ; mais pour le chef de l'Etat, qui a fait de la réforme du secteur de la défense la priorité de ses priorités, c'est bien là le traitement choc qui s'imposait ; cela, pour cette raison : cette armée nationale, de mémoire de Guinéen, a toujours ressemblé davantage à des bandes de hussards qu'à des troupes servant l'intérêt républicain d'un Etat souverain :
Peu importe le régime en place, chaque président de ce pays (de Sékou Touré à Dadis Camara) eut son lot de basses besognes perpétrées avec zèle par des hommes en treillis qui avaient fini par croire que la fonction de soldat leur conférait ipso facto le statut de supercitoyen agissant à sa guise, quand et où ils le désiraient.
On se rappelle les images du massacre du 28 septembre 2009 au stade de Conakry. Elles demeurent vivaces et, à ce jour, continuent de traumatiser bien des esprits.
Le professeur Condé aura choisi d'empoigner le taureau par les cornes ; mais il s'attaque décidément à du costaud ; ce ne sera pas tout de dégrossir la grande muette de près d'un dixième de ses effectifs ; il faudra inévitablement prévoir des mesures d'accompagnement qui fassent passer la pilule ; car si, ainsi que le chef d'Etat le reconnaît si bien, « les Guinéens sont installés dans des habitudes qui ne sont pas propices à la bonne gouvernance », il nécessite aussi de reconnaître l'impérieuse obligation de reconvertir, de la bonne manière et dans la vie civile, des hommes qui, tout le temps de leur carrière, n'auront eu pour seule occupation que celle de côtoyer des armes et de s'en servir à l'occasion.
Ce type de citoyen, on le gère avec beaucoup de tact ; sinon le processus dérape, vous échappe, et les conséquences qui en découlent se révèlent infiniment plus néfastes que les dérives que vous avez voulu corriger.
L'opération « caserne propre », le professeur Condé se doit de la réussir à tout prix ; il aura besoin, pour le faire, de toute sa pédagogie d'enseignant et d'un sens amélioré de l'écoute et du compromis. En tout état de cause, il s'agit là comme d'un processus qu'il faudra surveiller de près à l'instar du lait sur le feu.