GUINEEWEB.ORG

La Guinée nouvelle

Guinée : Le président Alpha Condé - Un homme condamné à réussir

 

Généralement, le lancement d’une personne ou d’un groupe dans une compétition ou un projet, nécessite la préparation à la gestion éventuelle du succès ou de l’échec.

Exceptionnellement, l’engagement du nouveau président guinéen dans le vaste projet de reconstruction nationale, ne lui offre aucune possibilité de prévision d’échec. Car, il a hérité d’un pays en état de dégénérescence économique sans précédent.

Le peuple, longtemps affamé et assoiffé, qui a voté pour le changement ne s’attend qu’à l’amélioration de sa situation misérable pour lui éviter une implosion sociale sans précédent. L’échec, dans ce contexte guinéen, est donc inimaginable!

Ainsi tous ceux qui connaissent cette Guinée Conakry ne peuvent être indifférents à la cérémonie d’investiture qui transforme un opposant historique en un dirigeant porteur de grand espoir.

Bamako est à un peu plus d’un millier de kilomètre de Conakry, capitale de la Guinée. Le samedi 18 décembre 2010, accompagné de ma sœur, j’ai quitté Bamako à 08 heures dans une voiture personnelle pour assister à l’investiture du président Alpha Condé à Conakry via Kankan. Passant par la frontière Kourémalen, la distance, 345 kilomètres, entre Bamako et Kankan, se fait agréablement en auto sans aucune secousse dérangeante.

Le déplacement entre Kankan (2ème capitale) et Conakry (1ère capitale) ne peut être fait ni par avion ni par train. Ces deux voies, aérienne et ferroviaire, ont complètement cessé d’être fonctionnelles quelques années seulement après la fin, en avril 1984, du régime du président Ahmed Sékou Touré. Actuellement ce trajet Kankan-Conakry, 667 kilomètres, n’est faisable que par route. Quelle route! De Kankan à Kouroussa, 80 kms, le chemin est praticable en 1heure 30 mn malgré quelques nids de poules.

Des routes scabreuses et dangereuses

Le tronçon Kouroussa-Dabola, long de 159 kms, est la plus déroutante route. Tout dirigeant qui a le moindre souci de la sécurité des usagers ne devrait pas laisser ce genre de route ouverte à la circulation. Car, au-delà des nids-de-poules, elle est jonchée de nids-de-moutons qui imposent à un bon chauffeur d’alterner entre la 1ere et la 2eme vitesse pour une durée d’au moins 5 heures de temps. Impossible d’enlever complètement le pied sur l’embrayage. Les secousses entre des gros trous rapprochés font craindre à chaque instant de voir la voiture se coucher sur son côté droit ou gauche. Après avoir effectué la moitié de ce trajet, j’ai failli faire le demi-tour pour annuler ma mission de reportage.

Mais comment justifier cette annulation à mes collègues et à nos lecteurs alors que des dizaines d’autos et de camions empruntent l’unique route scabreuse qui relie la 1ere et la 2eme capitale de la Guinée?

Les pieds collés aux pédales d’accélérateur et d’embrayage, les mains accrochées au volant, les yeux fixés sur des nids-de-poules et de moutons pour choisir instantanément les moins profonds, je ne pouvais qu’endurer le valvaire des secousses dans ma Mercédès 190 ronronnant de douleurs.

Arrivé à Dabola en compagnie de ma sœur et 3 autres passagers, nous avons pris un repos d’une vingtaine de minutes pendant lesquelles je suis resté debout pour détendre les muscles. Après avoir lancé un ouf de soulagement d’être entré à Dabola sans accident ni panne, un passager habitué de la route m’a laissé entendre «…les gros trous ne sont pas finis. Seulement ils sont plus éloignés les uns des autres sur les 400 et quelques kms qui nous séparent de Conakry…»

Un coup d’œil sur la montre, il était 15 heures. Pourtant nous avons quitté Kankan ce dimanche 19 décembre à 08 heures. Donc nous avons roulé pendant 7 heures sans atteindre la moitié du trajet Kankan-Conakry qui se fait entre 12 et 20 heures de temps. Je redémarre l’auto.

Nous poursuivons notre long voyage vers Conakry en passant par Mamou où un douanier, après vérification de mes documents de voyage s’est étonné « Pourquoi en allant faire le reportage de l’investiture du président vous ne pouvez pas voyager par avion?», dit-il à haute voix. Du même ton j’ai répliqué « Parce qu’il n’y a aucun avion entre Kankan et Conakry alors que je ne peux venir en Guinée sans aller voir ma mère à Kankan».

Des crevaisons à répétition

Nous continuons notre voyage sur la route tortueuse et dangereuse en forme de S majuscule successif. Une route étroite à double sens dont les gros trous ne se trouvent souvent qu’à la montée ou descente de grandes pentes raides.

C’est à quelques 25 kms de la ville de Kindia que nous arrive la première panne de crevaison à la roue du côté chauffeur. À peine 5 kms après avoir monté la roue de secours, vers 22 heures, survient une deuxième crevaison à la roue arrière du même côté chauffeur.

Nous sommes dans la brousse. Il nous faut l’aide d’autres usagers de la route. Vers 23 heures 30, un gros camion s’arrête et accepte d’embarquer mon neveu pour aller coller les deux pneus à Kindia.

Nous l’attendons au bord de la route, dans l’obscurité. À 03 heures 45, le neveu revient. Il a attendu derrière 8 autres personnes ayant le même problème de crevaison. Nous montons une roue et plaçons l’autre dans le coffre avant de reprendre le chemin. Devant nous, d’épais brouillards rendent la visibilité faible. Même si la route est relativement bonne, je roulais par prudence entre 40 et 50 kms heure dans les endroits qui le permettent.

Vers 05 heures, à moins d’une dizaine de kms de la ville de Kindia les deux roues du côté chauffeurs entrent dans deux trous alignés et se crèvent instantanément. Cette fois-ci nous sommes dans un village. Un villageois propriétaire de moto-taxis transporte le neveu à Kindia pour acheter deux pneus neufs. Il n’y a trouvé qu’un. Nous finissons l’installation du nouveau en arrière et du pneu de secours en avant vers 07 heures.

Nous sommes entrés enfin à Conakry vers 10 heures 50 le lundi 20 décembre. Ma sœur et moi, nous prenons la direction de Tombolia cité où habitent une autre sœur et son mari après avoir déposé le neveu et les 2 autres passagers chez-eux dans la ville de Conakry.

Une autorisation d’accès inaccessible

Se laver et se changer sont nécessaires mais pas question de se reposer. Car, il me faut le badge d’accès à la salle d’investiture. Je compose plusieurs fois les numéros de téléphone de l’Ambassadeur de la Guinée au Mali sans pouvoir le joindre. Suite à notre rencontre à Bamako, c’est lui qui doit s’occuper de moi à Conakry.

J’appelle alors aux Affaires Étrangères, un des responsables, Jean Touré me dit de passer à son bureau pour des formalités. Là où je loge, chez ma sœur, est à 25 kms du centre-ville. À mon arrivée, le responsable est absent. Un de ses collègues qui était en réunion de préparation de l’investiture me propose d’attendre dans le bureau de J. Touré. Trente cinq minutes plus tard, je retourne au bureau contigu pour demander de l’eau à boire à celui qui m’a indiqué le lieu d’attente.

Après s’être renseigné auprès d’une collègue, il me répond « Désolé nous n’avons plus d’eau ici ». Puis, il se tourne vers le groupe de discussion parmi lequel une femme visiblement énervée lance « si je n’ai pas de badge ce soir, je n’irai pas demain à ce lieu d’investiture…», quelques voix, dominées par des murmures, ont appuyé ces propos de leur collègue. C’est en ce moment que J. Touré arrive. Après les salutations, il regarde mes documents de voyage et me dit d’aller voir le directeur adjoint du Protocole d’État, Pivi Joseph, à qui il a parlé, pour récupérer mon badge de la presse. Il m’indique le chemin pour m’y rendre et me précise de revenir le voir quand j’aurai ce laisser-passer de la presse.

Au Protocole d’État on me signale l’absence de Pivi dont un représentant, Boubacar Dramé, m’écoute et regarde mes documents avant de souligner que J. Touré des Affaires Étrangères m’a donné des informations erronées. Je lui propose de parler à Touré pour que je sache quoi faire.

À l’issu de leur conversation, il me dit avoir donné à l’Ambassadeur du Mali en Guinée, qui vient de quitter leur bureau, tous les badges de la presse malienne. Quand je lui ai demandé comment joindre celui-ci pour avoir un badge, il se fâche devant une quinzaine de personne « Je ne sais pas, ça ne me regarde pas. Je t’ai dit qu’il n’y a aucun badge de la presse ici. Veux-tu enfin que je te donne un badge de la sécurité pour le maintien d’ordre?». Je lui ai fait comprendre que le respect mutuel est primordial entre nous en lui exprimant mon envie de savoir ce que je lui ai dit ou fait d’anormal. Après quelques secondes d’hésitation, il me présente ses excuses.

Avec l’aide d’un guide temporaire, vers 19h30, je suis arrivé à la résidence de l’Ambassadeur qui n’y était pas selon son gardien à la porte. J’y ai laissé un mot concernant le badge et mon numéro de téléphone local. Le fils de l’ambassadeur appelé à la porte de la cour me propose de contacter le chef de protocole de son père, du nom de Kamissoko. Personne de l’Ambassade ne m’a appelé. Le jour J mardi 21 décembre vers 08h 55, arrivé à côté du lieu de l’évènement, j’appelle Kamissoko, le chef de protocole de l’ambassadeur. Il me précise être à l’aéroport de Conakry pour accueillir le président du Mali et que les badges qu’il possède sont pour la presse présidentielle.

Comme un automate, je me dirige lentement vers l’entrée des officiels. Dans la grande incertitude de pouvoir accéder à la salle de l’investiture, je me sens confus. Après un si long et si difficile voyage dois-je me résigner à regarder cet évènement sur un des écrans géants comme ceux qui le suivront à la télévision dans leur salon sans se fatiguer ? M’est venu dans la tête cette phrase d’un grand comédien ivoirien, Ladji Kabako « A ko kèra maloya ba yé» autrement dit « La chose est devenue une grande honte» possiblement pour moi.

Devant cette porte, un monsieur, élégamment habillé, n’accepte pas son blocage « Non c’est inacceptable qu’on me barre toutes ces portes. Je suis un responsable régional du RPG et militant de ce parti depuis plus de 20 ans. Non c’est pas normal». La dizaine de militaires et les deux civils à la porte ne lui répondent pas.

Après quelques minutes d’hésitation, je sors ma camera vidéo du sac et lève la carte de presse malienne à l’endroit d’un des civils responsables. Celui-ci s’approche de moi et dit « C’est vous Diawara? Je vous reconnais. J’ai vu vos photos et écrits sur internet plusieurs fois. Surtout votre article «Le tournant ou le tourment» m’a vraiment impressionné. Je l’ai imprimé. Pourrai-je avoir vos coordonnées». Je lui ai donné ma carte d’affaire au moment où il m’indiquait les escaliers par lesquels on passe pour entrer dans la salle d’investiture du Palais du peuple.

Quelle incroyable et grande chance qui m’a évité la grande honte!

Exemplaire collaboration entre confrères

Arrivé dans la salle à 09 heures 28, je me suis approché d’un groupe de 5 personnes (2 femmes et 3 hommes) autour d’un micro, d’une caméra vidéo professionnelle sur trépied et d’un moniteur posé sur la table distillant des images. Je me présente à eux. Mohamed Sankhon, rédacteur en chef de la deuxième chaine de télévision guinéenne, RTG Boulbinet, m’a offert auprès d’eux une place que je n’ai pas voulu occuper à cause de ma chasse à l’information. Alia Keita, caméraman, assure le bon branchement de ma caméra vidéo.

Bref, toute leur équipe m’a accordé une attention hautement professionnelle. Au fil des minutes la salle pouvant prendre plus de 2000 personnes se remplissait. J’ai pu approcher et obtenir les contacts des personnalités guinéennes qui ont été très influentes au cours des 10 dernières années pour d’éventuelles entrevues.

Une organisation chaotique d’une investiture historique

Un beau programme de la cérémonie comportant des photos et biographies de l’ancien président de la transition, Sékouba Konaté et du nouvel élu, Alpha Condé, a été distribué mais, les heures mentionnées n’ont pu être respectées.

Placée en 4eme position des activités de la cérémonie, « l’ouverture de l’audience solennelle d’investiture du président de la République» est prévue à 12 heures. C’est à 12 heures 35 que les organisateurs déboussolés ont recours à l’aide du président élu pour mettre de l’ordre par ce message publiquement annoncé au micro « …Votre attention s’il vous plait…message du professeur Alpha Condé, président de la République. Il demande à tous les dirigeants de l’alliance Arc-en-ciel de libérer les deux rangers derrière les places des présidents de la république pour des officiels étrangers» Ce genre de message est le 6eme adressé aux guinéens dont le 1er a été ainsi lancé à 11 heures 27« On demande à tous les nationaux dans la salle de monter aux balcons pour laisser les places aux nombreux invités étrangers»

À 11 heures 39 « Il est demandé à tous les militants du RPG (Parti du Président A. Condé) de céder leurs places aux invités étrangers» 12 heures 09 le cinquième message est lancé «…faites preuve de patriotisme en allant aux balcons pour laisser les places aux invités étrangers»

Quand la plupart des participants sont restés sourds à cet appel, j’ai entendu, hors micro, un responsable de l’organisation donner l’ordre à un haut gradé de l’armée de faire intervenir ses éléments pour « dégager tous ceux qui sont au 3eme ranger au milieu de la salle en faveur des étrangers ».

Dans leur nervosité générale, ces organisateurs se concertaient, à côté de la loge réservée aux diplomates. Je m’y étais rendu pour éventuellement trouver l’ambassadeur de la Guinée au Mali, le général Konaté. C’est par contre le cohérent Président du PARENA, Tiéoulé Dramé, que j’ai vu et serré la main. On s’est chaleureusement salué. J’ai tourné au tour de ce petit QG improvisé des organisateurs pour comprendre les raisons de ce cafouillage organisationnel.

Un autre irrité par la lenteur des militaires à dégager les réticents, s’adresse à son collègue « Il faut que ces militaires prennent leur responsabilité en exécutant vite notre ordre». Son interlocuteur réplique « On devait limiter le nombre des invités ou le faire ailleurs».

Quelques minutes après, Monsieur Pivi s’approche et souligne avoir « trouvé 07 autres fauteuils qui doivent être rapidement placés dans la salle pour les étrangers». Je prenais note quand un responsable ayant constaté mes va-et-vients auprès d’eux a vociféré « Monsieur, si vous ne vous éloignez pas de nous, je vous mettrais dehors la prochaine fois», m’a menacé l’homme cravaté en costume et pantalon noirs au visage ruisselant de sueurs dans une salle pourtant climatisée.

Je n’ai pas tardé à rejoindre ma place à côté des représentants de la 2eme chaine de la Radio Télévision Guinéenne.

À 12 h 45 on annonce l’arrivée des chefs d’État invités. 12 h 48 ils commencent à entrer, sous les applaudissements, avec Abdoulaye Wade en tête. 13 h 12, Sékouba Konaté fait son entrée. 13 h 23, les membres de la Cour Suprême s’installent face au public. La lecture des lois commence. La cour confirme les résultats définitifs du 2eme tour de la présidentielle : 52, 52% pour Alpha Condé et 47,48% pour Cellou Dalein Diallo avec un taux de participation de 67%. Le président de la Cour procède à l’assermentation du président de la République, Alpha Condé, qui faisait dos au public.

Se sont ensuite succédés au micro le président de la transition, le général d’armé, Sékouba Konaté et son Excellence Olusegun Obasanjo, ancien président du Nigéria, Réprésentant de Goodluck Jonathan, Président en exercice de la CEDEAO.

Enfin, à 14 h 15, le Président de la République fraichement investi, Alpha Condé, commence son discours. Il a tâtonné au début en oubliant de citer les noms de certains chefs d’État présents dans la salle. Selon nos sources, il aurait reçu tardivement du protocole la liste complète des illustres invités. Il a alors fait une blague au doyen des présidents africains, le Burkinabé Blaise Compaoré en ces terme «Blaise, tu vois tu ne m’as pas tout appris, je commence mal là…», cela a provoqué des rires dans la salle. Pourtant cet homme, qualifié d’opposant historique, qui a réussit l’exploit de remonter la plus grande pente politique dans l’histoire des élections présidentielles, 18% contre 43% au 1er tour et 52% contre 47% au 2eme, méritait une investiture mieux organisée que celle du 21 décembre 2010.

Le président élu a terminé son discours d’investiture par cette phrase «Guinée is back», en français, la Guinée est de retour. Souhaitons que ce retour soit celui du changement positif des mentalités, de la relance économique et de la réelle démocratie dans l’intérêt de toute la nation guinéenne.

Des promesses d’entrevues manquées

Votre journal Option, selon sa politique éditorial, ne peut effectuer un reportage évènementiel sans l’agrémenter d’entrevues. J’ai alors couru derrière des personnalités publiques guinéennes pour avoir leur point de vue sur le profond changement de régime amorcé. J’ai pu avoir les coordonnées d’une dizaine d’hommes et de femmes de grande notoriété dont Rabiatou Serah Diallo, présidente du CNT, Makalé Traoré, directrice de campagne du président élu, Fodé Bangoura, ex-secrétaire général à la présidence du feu Général Lansana Conté, François Lounceny Fall et Lansana Kouyaté qui ont été à la fois des ex-Premier-ministres et candidats en fin Mamadou Sylla PDG de Futurlec et aussi ex-candidat à la présidentielle pour ne citer que ceux-là.

J’ai obtenu de madame Bah Rabiatou Serah Diallo une entrevue audio transcrite à la page suivante.

Selon le souhait de monsieur Mamadou Sylla, je lui ai laissé des questions écrites dont les réponses ne me sont pas encore parvenues. Lors de ma deuxième conversation avec monsieur Fall dans la soirée du mercredi 22 décembre, il m’a signifié être très occupé à faire de multiple concertations qui ne lui permettront pas de m’accorder une entrevue.

Le même mercredi dans l’après-midi, j’ai appelé monsieur Kouyaté qui m’a donné rendez-vous à son domicile à Matoto vers 19 h 00. Quant à Makalé, elle m’a offert de passer la rencontrer le jeudi 23 décembre à Midi. À la porte du domicile de monsieur Lansana Kouyaté à 19 h moins 10 mn, j’ai appris qu’il est absent. Je l’ai appelé, il s’est excusé de sa sortie imprévue et m’a donné un 2eme rendez-vous le jeudi 23 décembre à 11 h 00 que j’ai accepté sans oublier ma rencontre avec madame Traoré à midi.

Le matin, je suis venu devant le même domicile vers 10 h 30 dans l’espoir de quitter tôt pour ma rencontre de midi. À 11 h 30 j’attendais. J’ai appelé madame Traoré pour reporter le rendez-vous. Vers midi 15, je suis conduis dans le salon de monsieur Kouyaté. En moins de 3 minutes il est venu me saluer chaleureusement et demande de patienter. Quelques temps, il reporte l’entrevue pour une urgence et me demande de rester en contacte avec son chef de protocole, Elhadji Camara.

Vers 15 h 30, je rappelle monsieur Fodé Bangoura qui me dit être en dehors de la ville de Conakry pour commémorer l’anniversaire du décès du général Lansana Conté, son ancien patron.

En début de nuit, je contacte le chef du protocole de monsieur Lansana Kouyaté. Il me fixe un 3eme rendez-vous pour le vendredi 24 décembre à 10 h 00 du matin. À l’heure indiquée, je me présente au même lieu. En attente dans la cour, un des proches de Elhadji Camara est venu m’annoncer, à 11 h 15, l’annulation de la rencontre au nom de Lansana Kouyaté. Étonné par ce 3eme manque de disponibilité, j’ai appelé Elhadji Camara lui-même qui m’a confirmé l’annulation sans justification.

Il ne restait qu’un rendez-vous, celui de 18 h 00 avec madame Makalé Traoré. À mon arrivée au QG de l’Arc-en-ciel, celle-ci n’y était pas. L’ex- directrice de campagne m’a présenté ses profonds regrets au téléphone sous prétexte qu’elle à été appelée par le Président de la République à l’improviste.

En marge de ces rendez-vous manqué, je continuais à mener mes enquêtes sur une information alarmante concernant la situation d’une majorité de policier en exercice.

Une crise déstabilisatrice de sécurité publique à éviter

C’est le 21 décembre, jour de l’investiture du président Alpha Condé, qu’une information préoccupante m’a été filé après cette cérémonie par une source très fiable. Mais, la crédibilité de cette source d’information ne m’a point empêché de faire des vérifications dans le milieu concerné : La police nationale. La concordance des renseignements obtenus me permettent de diffuser l’information afin qu’une solution soit trouvée à cette crise latente.

Selon nos informations concordantes, le ministre de la Sécurité et de la Protection Civile, général Mamadouba Toto Camara, reconduit dans le nouveau gouvernement, est très contesté voire détesté par une grande majorité de policiers. Cette majorité accuse le ministre Toto Camara d’être à l’origine du blocage de leur avancement et du non payement de salaire de plusieurs d’entre eux.

« Depuis 2008, près de 4500 policiers sont en service dans différents départements sans salaires. Seuls 3000 agents sont payés avec leur grade de brigadier chef à un salaire mensuel de 510.000 francs guinéens (près de 50.000 FCFA). Alors qu’un gendarme au même grade est payé mensuellement à 1.150.000 FG plus 2 sacs de riz de 50 kgs gratuits. Le prix d’un sac de 50 kgs de riz varie entre 210.000 et 230.000 FG. Si on paye seulement un sac de 50 kgs pour nourrir notre famille combien nous reste-t-il pour vivre?», s’interroge un policier remonté

« Ce qui est grave, tous ces 7500 policiers ont payé, chacun, aux hauts cadres un montant variant entre 2 et 4 millions de FG pour être recruté. Ils sont tous au courant de cette corruption que nous subissons à cause du manque total d’emploi. Malgré tout cela nous payons notre nourriture pendant toute la période de formation », ajoutent un autre agent.

Un groupe de 4 policiers précise « Salarié ou pas un policier paye ses chaussures rangers entre 250 et 300.000 FG, sa tenue à 100.000 FG et son béret à 60.000 FG», un autre sort de sa poche une feuille de papier et commente « Le ministre Toto ne pense qu’à remplir son vendre en acceptant son avancement, celui des militaires sans aucunement se soucier du sort de nous les policiers. Lis cette décision »:

«Sur proposition du chef d’état-major général des armées et des différents chefs d’état-major, en commun accord avec le Premier ministre Chef du gouvernement et Monsieur le Chef de l’Etat, Président de la transition».

«- Décret d’avancement en grade : les militaires des forces armées guinéennes, du grade de caporal au grade de commandant, bénéficient d’un avancement au grade immédiatement supérieur et pris en charge à compter du 1er septembre 2010.

- Décret de nomination d’un officier général

Le colonel Nouhou Thiam, chef d’état-major général des armées est élevé à titre exceptionnel au grade de général de division et pris en charge à compter du 1er septembre 2010 ;

- Décret de nomination d’un officier général

Le général de division Mamadou Toto Camara est élevé à titre exceptionnel au grade de général de corps d’armée et pris en charge à compter du 1er septembre 2010. ;

- Décret de nomination d’officiers généraux

Les officiers supérieurs dont les noms et prénoms suivent sont élevés à titre exceptionnel au grade de général de brigade et pris en charge à compter du 1er septembre 2010. Ce sont :

- Colonel Aboubacar Sidiki Camara, état-major de la gendarmerie nationale,
- Colonel Boundouka Condé, état-major armée de terre,
- Colonel Naby Ibrahima Soumah, état-major de l’armée de l’air,
- Lt-colonel Lansana Touré, état-major de l’armée de mer,
- Lt-colonel Ibrahima Baldé, état-major gendarmerie nationale ;

- Décret de nomination d’officiers généraux

Les officiers supérieurs dont les noms et prénoms suivent sont élevés à titre exceptionnel au grade de général de brigade et pris en charge à compter du 1er septembre 2010. Ce sont :

- Colonel Siba Loholamou, état-major de la gendarmerie nationale,
- Colonel Mamadou Korka Diallo, état-major de l’armée de terre,
- Colonel Amadou Doumbouya, état-major de l’armée de terre,
- Colonel Mathurin Bangoura, état-major de la gendarmerie nationale.

Ces décrets qui abrogent toutes dispositions antérieures contraires, prennent effet à compter de leur date de signature et seront enregistrés au Journal Officiel de la République.

Conakry, le 3 juillet 2010

Général d’armée Sékouba Konaté 
Président de la République par intérim 
Président de la transition 
Ministre de la défense nationale».

« Vous pouvez garder cette copie. Mais, vous devez la mettre dans votre journal avec tout ce qu’on vous dit », me recommande le plus jeune.

Tous ces policiers sont armés. Des armes qu’ils ont eux-mêmes payés pour l’exercice de leur fonction. En juin 2008, la police et l’armée ont fait un affrontement sanglant qui s’est soldé par la mort de 3 militaires. Depuis lors la formation des policiers est assurée par les militaires.

« On avait prévu une révolte violente en décembre 2010, mais la tension qui existait entre les partisans d’Alpha Condé et ceux de Cellou Dalein Diallo, nous a dissuadé. Car l’opinion nationale et internationale penserait qu’on défend une des positions politiques.

Si le nouveau président ne trouve pas de solution à notre situation, le plutôt possible, nous serons en mesure d’agir pour assurer notre survie.»

La phobie du voyage dans l’obscurité

La nuit, la capitale guinéenne Conakry ressemble à un gros village. Depuis la fin du régime du président Ahmed Sékou Touré, l’eau et l’électricité demeurent une denrée très rare pour les populations citadines. Une habitante du quartier Matam explique « Dans la semaine, nous avons l’électricité et l’eau pendant deux jours dont 6 h par jour; de 18 h 00 à minuit. Il nous faut attendre 4 autres jours pour revoir la lumière par compte-goutte», précise-t-elle alors qu’à Kankan, la 2éme capitale de la Guinée, il n’y a aucune trace d’électricité depuis la fin de la révolution.

Ma grosse inquiétude était de pouvoir effectuer le voyage retour en traversant nuitamment des villages et coins de brousse obscurs sans revivre le stress des pannes imprévisibles. Surtout, le trajet Dabola- Kouroussa est en dégradation continue. Il est aussi un lieu propice au banditisme de grand chemin.

Nous avons quitté Conakry le dimanche 26 décembre à 7 h 45 du matin. À part la difficulté d’avoir du carburant le trajet Conakry - Dabola ne nous a réservé aucune mauvaise surprise. Le crépuscule pointait à l’horizon quand on a amorcé le trajet Dabola-Kouroussa qui regorge les plus gros nids-de-poule pour ne pas redire nids-de-mouton. Il fallait continuer à rouler tranquillement. On ne peut même aller autrement surtout à bord d’une Mercédès différente d’une auto 4x4.

A quelques kms de Saraya, village natal du célèbre et regretté artiste, Aboubacar Demba Camara du Bembeya, le carter de la voiture a percuté la bordure d’un profond trou. Arrivé à un niveau de la route relativement large, j’ai arrêté l’auto et constaté deux grosses fuites d’huile du carter. Il était 20 h 40. J’ai éteint le moteur dans la grande obscurité de la brousse.

On ne pouvait que demander l’aide d’un véhicule pour tirer notre auto ou nous transporter à destination: Kankan. Vers 22 h, un conducteur de gros camion, Mamadou Kouyaté, accepte de tirer l’auto gratuitement jusqu’à Saraya. De là, un frère chauffeur, Amadou, est venu tirer l’auto avec une corde courte et moins rigide qui a occasionné la brisure des deux phares et clignotants dans les descentes de grandes pentes. La Mercédès se trouve encore à Kankan pour des réparations.

Le défi de reconstruction est énorme

Comment et où commencer la reconstruction d’un pays qui manque de lumière, d’eau, de nourriture, de route, de soins de santé et surtout de dirigeants honnêtes?

Monsieur le président, Alpha Condé, pour être un bon maçon vous avez besoin de : Perspicacité (difficiles bons choix de proches collaborateurs), d’Autorité (grande fermeté dans l’application de la loi) et de Probité (capacité de réduire considérablement la corruption) pour le bien-être social de chaque guinéenne et guinéen.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article