La classe politique guinéenne ‘’prudente’’ et ‘’réservée’’ sur la nomination du Premier ministre

La nomination de Mohamed Saïd Fofana, au poste de Premier ministre chef de Gouvernement de Guinée, intervenue vendredi soir, est diversement interprétée par la classe politique guinéenne qui se montre ‘’prudente’’ et ‘’réservée’’ à propos de cette décision prise par le nouveau président élu Alpha Conde.

"Personnellement, je suis peu optimiste. Tout ce qu’on peut dire pour l’instant est que le Président Condé a respecté sa promesse prise envers l’ethnie soussou, celle de nommer un des siens à la Primature, mais il ne faut pas que les sousous s’attendent à grand- chose" a dit un leader politique allié du candidat malheureux de la Présidentielle, Cellou Dalein Diallo, joint au téléphone par APA samedi midi à Conakry, Selon lui, ce Premier ministre ne pourra rien entreprendre, sans consulter la Présidence.

"On s’attendait à un homme de grande envergure, connu du public pour son intégrité, son talent et son expérience. Une personnalité qui a posé des actes dans le passé et qui force l’admiration et le respect. Mais voilà que l’on nomme un cadre de l’intérieur. Je le vois mal échapper aux pressions. Certainement, le Président a ses raisons. Mais moi, il ne me rassure pas" a indiqué un cadre de l’administration guinéenne qui a requis l’anonymat.

"J’ignore s’il dispose de l’étoffe nécessaire pour redresser l’économie guinéenne ou répondre aux attentes du chef, aux promesses des populations et aux exigences des bailleurs de fonds. Mais je sais qu’il est un cadre qui connait le milieu des affaires et celui du commerce pour y avoir évolué des années durant. J’attends ses actes" a affirmé pour sa part un confrère de la place.

Le Dr Thierno Maadjou Sow, le président de l’Organisation Guinéenne de défense des droits de l’homme et du citoyen (OGDH), a de son coté dit ne pas connaitre le nouveau Premier ministre, mais qu’il souhaite que celui- ci soit celui de la rupture et du changement, qui œuvrera pour l’instauration de la bonne gouvernance, pour le respect des droits de l’homme et de la reforme de la justice et des forces de défense et de sécurité.

Un responsable de communication d’un candidat malheureux du premier tour de la Présidentielle du 27 Juin dernier, a pour sa part fait remarquer que le nouveau Premier ministre est un "cadre techniquement valable", mais se dit sceptique quant à ses chances de réussite.

"Avant ce Premier ministre, le Président avait procédé à d’autres nominations, dont le ministre- secrétaire général de la Présidence. S’il voulait réellement donner un signal fort de changement, je pense qu’il aurait dû nommer tout d’abord, le Premier ministre. Ce dernier risque d’ailleurs d’être gêné par le ministre- secrétaire général de la Présidence" a-t-il précisé.

Un membre du Conseil national de transition (CNT), l’organe qui sert d’Assemblée nationale pour l’instant, se dit prudent face à ces premières nominations :

"Le Président a promis la rupture et le changement, mais voilà qu’il a nommé un ancien fonctionnaire du régime défunt à la Primature. Cela s’appelle le changement dans la continuité. Je pense que le Président a commencé de voir les vraies réalités du pouvoir. Qui vivra verra, nous attendons la suite Je pense que cela n’augure pas le changement tant annoncé" a-t-il annoncé.

Pour un membre influent de la société civile, joint au téléphone, alors qu’il séjourne à Paris, la nomination du Premier ministre est une "surprise" :

"Nous ne le connaissons pas. C’est vraiment une surprise. Nous attendons de voir la suite. A cette allure, je pense que la gestion du pays se fera à partir de la Présidence. Le gouvernement sera composé de technocrates, mais est- ce qu’ils auront les mains libres" s’est- il interrogé.

Economiste de formation, la cinquantaine, M. Fofana, qui était précédemment directeur des projets au ministère du Commerce du précédent gouvernement de transition a été nommé, vendredi soir, Premier ministre chef de Gouvernement.

Issu de la Basse Guinée, comme promis par le nouveau Président, Alpha Condé, qui entend ainsi récompenser les militants de cette région pour avoir été l’un des artisans clés de sa victoire à la Présidentielle du 7 novembre 2010, M. Fofana est peu connu du public guinéen.