13 Avril 2011
L’ONU et Amnesty International appellent à la fin des représailles contre les partisans de Laurent
Gbagbo
Certains parlent de véritable chasses à l’homme. D’autres, de violentes représailles après la chute
de Laurent Gbagbo, qui a été transféré mardi 12 avril vers le nord de la Côte d’Ivoire, selon l’ONU.
« D’après les témoignages recueillis par notre organisation, c’est l’heure des règlements de
comptes, même s’il est très difficile de dire combien de personnes cela concerne », s’alarme Salvatore Saguès, du service recherche d’Amnesty International.
Des hommes armés, dont certains portaient les uniformes des Forces républicaines d’Alassane
Ouattara, investissent depuis mardi 12 avril les quartiers réputés favorables à Laurent Gbagbo, notamment à Yopougon et Koumassi.
Ils cherchent avant tout des miliciens ou des hommes supposés appartenir aux partisans les plus
acharnés du président déchu. Un témoin a raconté à Amnesty International comment un policier de la même ethnie que Laurent Gbagbo avait été appréhendé à son domicile et tué à bout portant sous
les yeux de ses voisins.
Le président manque de contrôle sur ses troupes
« Ils bénéficient sans doute de dénonciations, poursuit Salvatore Saguès.
Beaucoup de jeunes ont fui leur domicile dans la crainte d’être pris pour cibles. Le gouvernement ivoirien doit d’urgence condamner ces exactions avec force. »
L’ONU a également lancé un appel en ce sens auprès d’Alassane Ouattara. Mais les pillages montrent
le manque de contrôle du président élu sur des troupes composées pour la plupart d’anciens rebelles.
« Le ralliement du patron de la gendarmerie et son appel à la reprise du travail devraient
contribuer au retour à l’état de droit », espère cependant un humanitaire, dont les équipes vont tenter d’accéder aux populations pour la première fois depuis une dizaine de
jours.
Les règlements de comptes se poursuivent également dans le pays. D’après Amnesty International, le
village de Zissoko, à 300 km à l’ouest d’Abidjan, a été attaqué à plusieurs reprises par des forces armées favorables à Alassane Ouattara.
30 000 habitants de Bloléquin ont disparu de leurs maisons
Le chef du village, Gnagbo Matthias, a été enlevé. Entre Duékoué et
Bloléquin, près de la frontière du Liberia, des observateurs étrangers témoignent aussi de villages à moitié détruits, déserts. Leurs habitants ont disparu en brousse. « Ils ont peur », assure un
humanitaire français.
À Bloléquin, les civils ont d’ailleurs laissé la place aux partisans de Ouattara. Les 30 000
habitants n’ont toujours pas regagné leurs maisons. Ils ont fui les violences, qui auraient fait au moins une quarantaine de morts la semaine dernière, d’après les premiers éléments relevés par
les enquêteurs des Nations unies.
« Les casques bleus de la mission de la paix des Nations unies sont absents des lieux, ce qui
n’encourage pas la population à rentrer », observe Salvatore Saguès, qui appelle l’Onuci à muscler ses interventions.
Mercredi 13 avril, Alassane Ouattara a promis de demander à la Cour pénale internationale (CPI) des
enquêtes sur les massacres commis dans l’ouest du pays. Il s’est par ailleurs engagé à relancer rapidement les exportations de cacao.