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Législatives «irrégulières» en Guinée: la communauté internationale hausse le ton

Législatives «irrégulières» en Guinée: la communauté internationale hausse le ton

 

Après dix jours d'atermoiements, la communauté internationale a haussé le ton en Guinée en confirmant des «irrégularités» lors des législatives du 28 septembre, rejetées par l'opposition et dont les résultats complets sont toujours attendus.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dans une déclaration à la presse mardi soir, le représentant de l'ONU Saïd Djinnit, assisté des ambassadeurs de France, des É.-U., de l'Union européenne (UE) et d'Afrique de l'Ouest, ont fait état de «manquements» et «irrégularités» dans huit circonscriptions sur 38, pouvant «remettre en cause la sincérité de certains résultats».

Les diplomates, qui jusqu'ici se bornaient à appeler au «calme», ont en particulier dénoncé la non-prise en compte «d'un nombre significatif de suffrages exprimés» et émis une série de «recommandations» à la Commission électorale afin de faciliter les recours des partis devant la Cour suprême dont ils disent attendre «rigueur» et «impartialité».

Cette déclaration a été accueillie mercredi avec satisfaction par l'opposition qui, la veille, avait «lancé un appel à la communauté internationale, garante de l'application de l'accord politique inter-guinéen, afin qu'elle use de toute son influence pour que les fraudes constatées soient reconnues et les élections reprises en conséquence».

 

«Pour la première fois, ils touchent enfin le vrai fond du problème», a déclaré mercredi à l'AFP le porte-parole de l'opposition, l'ancien Premier ministre Sydia Touré, affirmant que les huit circonscriptions en cause «se situent dans la zone de (son) parti», l'Union des forces républicaines (UFR).

L'opposition guinéenne, qui a dénoncé des fraudes «massives» et «généralisées», avait demandé la semaine dernière l'«annulation pure et simple» du scrutin, menaçant d'appeler à des manifestations au risque de replonger le pays dans la violence.

Ses chefs devaient réunir mercredi un «comité de crise».

Bureaux de vote «disparus»

Parmi les résultats publiés par la Commission électorale nationale indépendance (Céni), accusée de «partialité» par l'opposition, certaines anomalies sont flagrantes: ainsi, dans la préfecture de N'Zérékoré, principale ville de la Guinée forestière (sud-est), plus de 40% des bureaux de vote n'ont pas été pris en compte, ramenant la participation à 30%.

«Quels bureaux ont été supprimés? Pourquoi? Dans quels quartiers ou communautés étaient-ils installés?», s'interroge un diplomate qui rappelle qu'en Guinée, «le vote est essentiellement communautaire». Le président Alpha Condé est Malinké, quand les principaux chefs de l'opposition Cellou Dalein Diallo et Sydia Touré sont Peul pour le premier, Soussou pour le second.

En pays malinké, dans la région de Kankan, fief du président, le taux de participation a atteint des niveaux jugés «astronomiques», dépassant les 92% par endroits avec jusqu'à 97% des suffrages pour le parti au pouvoir, le Rassemblement du Peuple de Guinée (RPG).

Mercredi matin, selon des sources de l'opposition confirmées par un diplomate, le RPG était crédité de 56 députés contre 54 pour l'opposition réunie, la majorité absolue étant de 58 élus.

Les experts électoraux mettent toutefois en garde contre des projections prématurées, soulignant que le mode de scrutin mixte (uninominal pour 38 députés, proportionnel au plus fort reste pour 76) rend les estimations très délicates.

Par ailleurs, si la Cour suprême ordonnait une reprise même partielle du scrutin, le nouveau vote, en modifiant le quotient électoral, aurait une incidence sur l'ensemble des résultats.

Mercredi, la Guinée attendait encore les résultats de deux circonscriptions cruciales de Conakry, Ratoma et Matoto, la commune la plus peuplée du pays.

Dans le camp du parti au pouvoir, on se disait «serein» après la déclaration des représentants internationaux au «comité de suivi» en invoquant les «nombreuses fraudes» de l'opposition.

«Si on isole les cas litigieux, l'opposition va perdre beaucoup de sièges car il y a beaucoup plus de fraudes dans leur camp», a aussi dit à l'AFP une source à la Commission électorale sous couvert d'anonymat.

Un argument accueilli dans un grand éclat de rire par Sydia Touré: «Alors comme ça, j'aurais fraudé pour perdre?».

«Mais si on avait voulu frauder, on aurait fait 75% et c'était fini!», répondait en écho un haut responsable du parti pouvoir.

 

ANNE LE COZ
Agence France-Presse
CONAKRY

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