7 Novembre 2010
Quatre mois après le premier tour et deux reports officiels, le second tour de l’élection présidentielle s’ouvre ce dimanche 7 novembre 2010 en Guinée dans une atmosphère tendue.La confrontation politique entre les deux candidats, Celou Dalein Diallo et Alpha Condé s’est transformée en un début de confrontation entre leurs deux communautés d’origine. Entre le 19 et le 24 octobre les échauffourées à Conakry et dans plusieurs villes du pays ont révélé au grand jour le clivage grandissant entre Peuhls et Malinkés, au point que les autorités ont dû depuis multiplier les appels au calme.
A la veille du second tour, les deux candidats se sont serrés la main à deux reprises. La première, face à la communauté internationale, et la seconde face au général Sekouba Konaté, le président de la transition, qui a demandé aux deux hommes de maîtriser leurs militants et de tout faire pour que le scrutin soit apaisé. Il a par ailleurs invité « les services de sécurité à plus de vigilance et de fermeté ». Les forces de l’ordre étaient en effet restées étrangement passives lors des affrontement dans la ville de Siguiri, en Haute Guinée, les 23 et 24 octobre dernier.
La communauté internationale, représentée à Conakry par le Groupe international de contact, ne cache pas son inquiétude et demande aux deux candidats d’éviter les dérives ethniques. Dans un dernier geste d’apaisement, samedi soir, des représentants des deux candidats ont signé un protocole d’accord afin de réguler la présence de leurs délégués dans les bureaux de vote de deux régions sensible, le Fouta, en Moyenne Guinée, et la Haute Guinée.
Apaiser le climat
Celou Dalein Diallo s’est finalement résolu à envoyer des délégués dans les bureaux de vote des villes de Siguiri, Kouroussa et Kissidougou, où les Peuhls avaient fuit après les incidents d’octobre. En retour, Alpha Condé s’est engagé à diminuer le nombre de ses délégués dans le Fouta, où leur arrivée massive ces derniers jours était vécue comme une provocation par les populations peuhles. Un accord qui devrait contribuer à apaiser le climat dans ces deux régions clés du pays.
Sur le plan politique, ce second tour intervient quatre mois après le premier tour. Entre temps, les reports successifs ont permis de faire évoluer la physionomie du scrutin. La Céni a déployé près de 1 500 bureaux de vote supplémentaires pour mieux couvrir le pays, portant leur nombre total à 9 954.
Un scrutin très ouvert
Des centaines de milliers d’électeurs ont reçu leur carte en lieu et place du récépissé et seuls 70 000 électeurs sur les 4 142 000 ne pourront pas voter. Mais surtout, le temps a permis à Alpha Condé de renforcer ses alliances en Haute Guinée, partagée entre sept candidats au premier tour, et de signer des alliances avec les candidats de poids en Guinée Forestière comme Papa Coly Kourouma qui avait recueilli 5% des voix.
Celou Dalein Diallo a, pour sa part, conclu une alliance politique avec l’UFR de Sydia Touré, bien implanté en Basse Côte, région majoritairement peuplée de Soussou. C’est d’ailleurs le vote qui apparaît comme la clé du second tour. Les deux candidats ne s’y sont pas trompés et ont largement sillonné cette région. Au total, le scrutin paraît beaucoup plus ouvert que ce que les résultats du premier tour pourraient laisser penser. Celou Dalein Diallo avait recueilli 40% des voix et Alpha Condé 18%.
Ce sont deux candidats aux profils politiques bien différents qui en appellent aux suffrages des électeurs aujourd’hui dimanche 7 novembre 2010. D'un côté, l’opposant historique et de l'autre, le grand commis de l’Etat entré en politique. Alpha Condé a consacré sa vie à la politique. Né en 1938 à Boké, en Basse-Guinée, il doit quitter le pays vers quinze ans pour poursuivre ses études en France. Il y milite dans des partis d’opposition au régime de Sékou Touré. Un activisme qui lui vaudra d’être condamné à mort par contumace en 1970. L’exil ne prend réellement fin qu’en 1991. De retour au pays, Alpha Condé milite pour une démocratisation du régime face au successeur de Sékou Touré à la tête de l’Etat, Lansana Conté. Il prend part aux élections de 1993, puis de 1998. Il inquiète le pouvoir. On le met en prison plus de vingt mois. Il est gracié en 2001. Après la mort de Conté et l’arrivée de Moussa Dadis Camara au pouvoir, fin 2008, Alpha Condé et son parti, le RPG, restent dans l’opposition et continuent à réclamer des élections. Cellou Dalein Diallo, lui, s’est placé dès la fin de ses études au service de l’Etat, dont il a gravi les différents échelons. Né en 1952 à Dalein, en Moyenne-Guinée, diplômé de gestion, il travaille à la banque guinéenne du commerce extérieur, puis à la banque centrale. Cellou Dalein Diallo commence un parcours gouvernemental à partir de 1996. Il occupe différents ministères et devient Premier ministre en 2004, avant d'être limogé deux ans plus tard par Lansana Conté. Selon l’un de ses proches, c’est cette mise à l’écart qui provoque le déclic et le fait entrer en politique. En 2007, Cellou Dalein Diallo prend la tête de l’UFDG. Il devient l’une des bêtes noires de Moussa Dadis Camara, ce qui contribue fortement à sa notoriété. |