5 Mai 2010
« Je suis fier d'être Kouyaté. (...) Un griot a plusieurs fois assuré l'intérim
dans le Manding (...). » Le leader du PEDN, candidat à la présidentielle du 27 juin revendique et défend ses origines avec autant de facilité que d'irrévérence. C'était lors d'un débat à la
télévision nationale.
Lansana Kouyaté a eu une occasion unique pour laver l'affront de ses adversaires politiques et de ses nombreux détracteurs aujourd'hui tapis dans l'ombre. Cette maîtrise de ses origines - il est
le digne descendant de Balla Fasséké Kouyaté, maître de la parole ayant été envoyé par Soundiata Keita auprès de Soumaoro Kanté pour exiger la capitulation de celui-ci - le conforte-il cependant
dans la course à la présidentielle ? Certainement non. Elle a permis néanmoins à nombreux téléspectateurs de se faire une autre idée de l'homme.
Un peu éclairés dorénavant, des détracteurs se tournent vers les origines de Lansana Kouyaté, pensant secrètement que c'est un critère d'office éliminatoire de la course à la présidentielle. Au
fait, cet article existe-il dans le code électoral, la Constitution en gestation ? On n'en a pas la moindre idée. En attendant, Kouyaté arbore fièrement sa tunique de griot et draine encore
aujourd'hui une grande foule notamment de la région de la Haute Guinée, acquise à la cause de son parti, le PEDN. Dans cette foule, on y rencontre assurément, des nobles ou fils de nobles. Bref,
toutes sortes de déclinaisons identitaires. Chacun exprimant ses sentiments et ses rêves à l'égard de l'ancien PM de consensus. Par cet acte, bien que politique, le critère de caste est peu ou
pas du tout considéré. C'est le devenir de la Guinée qui compte. Sinon qui pouvait imaginer qu'un descendant d'esclaves Kenyan pouvait entre autres dérouter la machine politique des Clinton et
briguer la magistrature américaine ?
En ce XXIè siècle, les expériences pratiques et le bagage intellectuel ne sauraient tromper. Obama, lorsqu'il avait essuyé la toute première fois une défaite cinglante, il s'est retourné à
l'école pour le Droit. Et tout le monde a vu comment il a mené sa campagne et barrer la route à de redoutables adversaires américains de souche, pas d'enfants d'esclaves. Comme quoi, il ne faut
pas ''éliminer'' Lansana Kouyaté de la course à la présidentielle. Certainement, d'autres leaders pourraient se retrouver dans le même embarras sociologique. Mais à des degrés plus ou moins
différents. On a compris que l'homme lui, ne se gène point de sont identité : il est griot et il le proclame. Et les autres Samba Tala, Koumba Alarba, Manga Famoudou, des déclinaisons
identitaires et d'autres qui, dans certaines familles, ne sauraient trouver une épouse, encore moins, penser à briguer une magistrature suprême.
C'est donc un faux débat que celui d'être noir, un griot ou tout simplement un homme de caste ! Surtout que dans certains villages, avec l'évolution de la société, des familles finissent souvent
par se rebaptiser (Comme ces nombreux yettè Barry, Keita, Soumah, ...) pour faire disparaître complètement la ''tâche noire''. Conséquence, des personnes qui portaient des noms excentriques
pourrait porter par exemple le nom du Prophète (PSL). Les sociologues ne vont certainement le démentir. Où est donc le problème ? Il est plus intéressant de s'occuper, de critiquer une idée, une
politique, une feuille de route que de passer son temps sur le détail. S'il est apte, il passera absolument au lendemain du 27 juin prochain (Nous n'avons rien contre lui, ni pour lui. Ce qui
nous a intéressés, c'est le caractère inédit : un griot qui n'a pas le ''droit'' d'être Président de la République chez lui). Mais on n'est pas là encore. On attend la rude bataille. Pas celle de
1235 à Kirina, mais celle des urnes en 2010, en Guinée Conakry. Ça promet !