1 Juillet 2010
Tel était le titre de notre Grille de lecture du 28 juin 2010. Un éditorial qui
saluait le relatif bon déroulement du scrutin guinéen tenu la veille, dans ce pays sevré de démocratie pendant un demi-siècle par des dirigeants "éclairé" ou obtus.
Rarement en effet, sous les tristes tropiques, une élection se déroule sans qu’il y ait des contestations postélectorales violentes, venant souvent de mauvais perdants ou d’opposants transis ;
que ce soit au Gabon où l’opposition a gagné la présidentielle, mais perdu la présidence, ou dans une moindre mesure au Togo où force est de reconnaître que Faure Gnassingbé n’avait pas besoin de
fraudes pour rempiler.
Concernant la Guinée, notre optimisme, qui était du reste tempéré, est mis à rude épreuve, car 72 heures après cette présidentielle historique, et alors qu’à l’heure où nous traçons ces lignes
Sékou Ben Sylla et toute l’équipe de la CENI n’avaient pas encore proclamé les résultats provisoires, 21 candidats sont montés au créneau pour dénoncer des fraudes. Autant dire pratiquement tous
les postulants. Pour le moment, aucun chiffre officiel n’a transpiré, mais peut-être qu’au moment où vous tiendrez ce journal entre les mains, la situation aura évolué.
Les Guinéens sont sortis nombreux pour décider de l’identité de celui qui présidera aux destinées des 6 millions d’âmes de ce pays. Tant que c’était un seul qui criait au loup, il n’y avait pas
de quoi être pessimiste, mais, que sur 24 candidats, il y en ait 21 qui hurlent au voleur !
La situation postprésidentielle en Guinée, malgré les appels à l’apaisement, risque donc de s’enfoncer dans l’embrouillamini politique. Pratiquement tous les candidats seraient-ils des voleurs à
ce scrutin ? Pourtant, le président intérimaire avait rencontré les 24 candidats pour les rassurer et les inviter à cultiver le fair-play.
Message apparemment non reçu, car ces dénonciations sont du pain bénit pour certains militants, dont le rêve inavoué serait de déclencher la violence.
3 postulants sur les 24 attendent donc les résultats de la CENI sans tapage. Est-ce des faire-valoir qui ne voudraient pas du palais de Sékoutoreya ?
Cependant on peut mettre ce remue-ménage d’avant-résultats sur le compte de l’impréparation de la CENI. Avec les délais démentiels imposés par le président intérimaire et acceptés par la
Communauté internationale, on se doutait bien que la CENI ne pourrait pas relever tous les défis. N’est-ce pas ces irrégularités qui sont mises en épingle par les plaignants ?
Or, le plus drôle dans toute cette histoire de vol électoral décrié est que, dans le fief de chacun des candidats, on a plus ou moins dénoncé des actes non conformes, un euphémisme pour désigner
les fraudes. En vérité, de telles contestations seraient, à la limite, acceptables si l’on avait eu connaissance des résultats provisoires.
Or tout semble indiquer que c’est sur la base de supputations et de présomptions que les 21 poussent de l’urticaire. Et si un bémol n’intervient pas, la putréfaction risque de gagner cette fin du
processus, censé faire voir à la Guinée un jour nouveau. Il reste à souhaiter que, si ces fraudes sont avérées, les contestations se fassent dans des cadres légaux. La Guinée a assez souffert de
la violence.