8 Septembre 2010
Janvier-Juin 2010. Les six mois transitoires prévus par les Accords de Ouaga se sont déjà écoulés. Les prolongations se sont jouées, on peut le dire, dans la plus grande angoisse. Une angoisse à partir de laquelle Jean-Marie Doré a tenté sans suite de se fertiliser. Reste qu’il semble s’assurer d’une fin bien dorée.
Le rêve de Jean-Marie Doré de rallonger sa jouissance à la Primature a été stoppé net et toutes les manœuvres et calculs politiciens – organisation d’un référendum pour avaliser la Constitution revue par le CNT, obsession de réforme constitutionnelle et du code électoral, etc. – ont été, dans une vive polémique, tuées dans l’œuf. Le vieux caïman de 73 ans semble désormais abandonner la bataille … pour verser dans la distraction, pour ainsi utiliser un bel euphémisme. La trouvaille ? Safari à travers l’arrière-pays. Première version officielle : évaluation de l’état de dégradation des voies de communication, en lieu et place du ministre des travaux publics. Comme si c’est maintenant, en deux semaines de sursis, que JMD pourra développer toutes ces infrastructures en profonde dégradation.
Pendant ce temps, l’autoroute Fidèle Castro attend toujours la fin des travaux, près de dix ans après. C’est un démagogue en puissance, crient ses adversaires ! Deuxième version officielle exprimée ces dernières 72 heures: sensibiliser les populations à la base sur la nécessité d’organiser une présidentielle sans encombres. Mais en réalité, derrière ce voile transparent d’homme de la République, JMD recherche ses repères perdus. Après tout, il sait qu’il vient de loin.
Au-delà de l’évaluation des routes dégradées
Qualifié bien avant les massacres du stade du 28 septembre, de traître par les siens et certains adversaires du forum des forces vives d’alors, puis déclaré persona non gratta dans la zone forestière pour s’être associé à des leaders politiques "assoiffés" du pouvoir ayant osé dire niet à une éventuelle candidature à la présidentielle de l’ex-chef de la junte Moussa Dadis Camara, Doré, ne serait-ce que pour son hypothétique survie politique, a l’obligation d’aller prendre la température où c’est plus chaud. Il sait alors ce qu’il fait, pour avoir failli à un moment donné, se faire enlever à une heure indue de la nuit à sa résidence par « un groupe d’hommes dont le nombre variait entre 15 et 20 personnes. Des personnes qui avaient réussi à bloquer les trois voies qui aboutissent à mon domicile. »
Traumatisé depuis, il se demande encore en son for intérieur si la rancœur piquée à mi-chemin s’est réellement dissipée. Rien ne tranquillise en tout cas actuellement l’ex porte-parole du défunt forum des forces vives. Il faut donc à tout prix aujourd’hui, au-delà de la visite des routes dégradées, se rassurer d’un certain compromis en vue d’une sortie somme toute honorable. Surtout qu’avec El tigre, le CNDD est presque à terme. A son corps défendant, Doré a ainsi compris – à l’heure même où la hantise d’aller vite aux élections grandit chez Sékouba Konaté dont le pays est devenu une patate chaude dont il faut absolument se débarrasser – que plus rien ne pourra dorénavant retarder le second tour dont la campagne est déjà enclenchée. Autant alors tout abandonner et aller vite se faire réhabiliter par les siens en se camouflant derrière un faux argument « d’évaluation du niveau de décadence des routes nationales ». Le jeu en vaut vraiment la chandelle chez le septuagénaire en fin de carrière politique et administrative.
Comme quoi, l’unique option actuellement pour Doré est de se rétracter contre son gré et de penser réellement cette fois-ci au lendemain électoral signant du coup la fin de son long bail à la Primature. Donc l’épilogue d’une survie politique mais surtout d’une époque "juteuse" pour ce mutant politicien qui a déjà procédé, il faut le rappeler, à la cession du tiers de l’offshore guinéen à Hyperdynamics le 25 mars ; à la signature, le 15 avril, d’une convention pour évacuer le minerai de fer de Simandou par le Liberia. Des signatures engageant de facto l’Etat.
Pas de regret pour l’agneau du sacrifice
En attendant de ressentir les conséquences des actes posés, en signe d’adieux, JMD a pris ses aises pour au moins faire du tourisme aux frais du contribuable guinéen. A défaut de pouvoir faire campagne pour la présidentielle, à l’image des deux finalistes ou autres candidats malheureux du premier tour, JMD change d’air. Certainement, l’unique fois sur le dos de l’Etat ! L’âge avance et la mort politique est presque signée. Tant mieux si la retraite est déjà assurée. Bien Dorée ! Peut-être, après son départ de la Primature, sa vieille sangyung bleue déglinguée et presque en épave, héritée de la législature d’El hadj Biro Diallo, ne sera plus visible dans la circulation. Sa résidence de Donka, elle, a déjà connu une profonde cure de jouvence, le tout pendant ce semestre et plus de gestion de la Primature.
De toutes les façons, Jean-Marie Doré n’aura pas regretté d’avoir été l’agneau du sacrifice en étant porté à la Primature. Surtout que même en lice pour la présidentielle, il aurait comme à l’accoutumée, occupé la queue du peloton. Mais, on pouvait le parier, ce serait loin, très loin avant Bouna Keita… Sacré Jean-Marie ! Pourvu que le passage à la Primature ne soit pas préjudiciable à l’Etat. Mais sait-on jamais ? On croise néanmoins les doigts.