1 Février 2011
Les militants de l’Union des forces démocratiques de Guinée sont victimes de règlements de comptes politiques chez eux, a déclaré dimanche à Dakar, dans un entretien accordé à la radio privée dakaroise, Radio Futurs médias (RFM) l’opposant guinéen Cellou Dalein Diallo, en tournée en Afrique et en Europe pour remercier ses partisans après le second tour de la présidentielle qui l’a opposé à Alpha Condé.
Il a dénoncé à cet effet le limogeage de chefs de quartier appartenant à son parti à
Conakry.
«Ceci relève de règlements de comptes politiques», a dénoncé Cellou Dalein Diallo, qui a toutefois précisé
qu’il était trop tôt, pour lui, de juger le régime du président Alpha Condé.
«C’est encore trop tôt. Je préfère attendre pour juger le gouvernement aux actes. Je critiquerai quand je
constaterai des choses qui méritent de l’être. Je ne critique pas pour critiquer. Même si je suis un opposant, je dois le faire sur des bases claires. Mais je remarque déjà des démarches qui sont
des entorses à la Constitution, notamment en ce qui concerne le choix du Médiateur et des membres de la Haute cour de la communication. La Constitution est claire, de même que les lois
organiques, qu’il convient de respecter quant à ces choix», a fait remarquer l’opposant guinéen, ajoutant également que ses militants ont partout dénoncé le déroulement du recensement des
ressortissants de la Guinée à l’étranger, à la veille de la présidentielle.
Selon lui, «le recensement n’a pas été conduit avec la plus grande clarté, car il n’a pas concerné tous les
Guinéens qui voulaient se faire recenser. Rien qu’en Gambie, on a recensé 11.000 ressortissants et au Sénégal, 25.000. Mais il est clair que les ressortissants guinéens dans ces deux pays font
plus d’un million de personnes. Donc prochainement, on devra prendre en compte ces gens-là».
Réagissant à la déclaration du président guinéen qui avait promis de ramener la Guinée au niveau où l’avait
laissée le défunt chef de l’Etat Sékou Touré, M. Diallo a estimé: «C’est un discours un peu inquiétant, parce qu’on peut ne pas aimer Lansana Conté, mais on doit reconnaître que grâce à lui, la
Guinée a connu des avancées certaines. C’est vrai que c’est grâce à Sékou Touré que la Guinée est devenue indépendante, mais c’est avec Conté qu’il y a eu le multipartisme. Alors, si Condé veut
ramener la Guinée à l’époque de Sékou Touré, cela voudra dire que nous aurons un pouvoir totalitaire et dictatorial. Ce sera donc un énorme recul. La Guinée a enregistré beaucoup d’acquis sous
Conté. Si on veut remettre cela en cause, ce serait extrêmement grave».
Pour un bon déroulement des élections législatives prévues dans les mois à venir, M. Diallo a proposé
l’ouverture du dialogue entre le pouvoir et l’opposition. Pour éviter les malentendus, il faut que ces élections soient claires. Pour cela, il faudra définir un calendrier pour le déroulement ce
ces élections et désigner un président de la CENI. Il faut que tout cela soit organisé de manière consensuelle. Le président Condé dit qu’il veut des élections incontestables, mais il faudra
mettre en place les institutions pour dépasser la transition».
Selon lui, «tant que toutes les institutions comme l’Assemblée nationale, ne seront pas installées, on aura
l’impression que la transition continue, même s’il y a un président élu».
Cellou Dalein Diallo, qui ambitionne de remporter ces élections législatives, a dit être à la tête «d’un
grand parti. Je peux dire que c’est le plus grand parti en Guinée. Si on se rappelle que j’ai obtenu 44 pour cent des suffrages au premier tour, c’est normal que je puisse remporter les
législatives, en compagnie des partis de la coalition qui m’a soutenu, qui ont les mêmes idéaux et les mêmes convictions que moi».
Soutenu principalement par Sidiya Touré (arrivé 3ème au premier tour de la présidentielle), M. Diallo a
indiqué qu’il va discuter avec celui-ci pour poursuivre la collaboration.
«Nous allons voir comment allier nos deux partis, mais aussi élargir le dialogue avec tous les partis qui
avaient décidé de soutenir ma candidature au second tour», a promis M. Diallo qui a regretté l’excès de confiance qui a entraîné sa défaite.
«Nous avons fait une évaluation à l’interne pour constater des erreurs que nous devons corriger. Mais
aussi, le gouvernement de transition de Jean-Marie Doré, ainsi que l’administration, nous ont combattus. Nous nous sommes rendu compte qu’ils ont tout planifié pour nous priver de notre victoire.
Il y a eu aussi l’excès de confiance. Le fait que nous ayons pu obtenir 44 pour cent, en plus des partis qui ont décidé de nous soutenir, nous nous étions dit que la victoire était déjà acquise
et que donc, ce n’était pas la peine de faire davantage d’efforts. Nous avons dormi sur nos lauriers et nous avons trop fermé les yeux sur beaucoup de choses, notamment les fraudes
massives».
A propos des problèmes que rencontre la coalition Arc-en-ciel qui avait soutenu le président Condé, M.
Diallo n’a pas voulu se prononcer.
«Je n’en ai aucune idée. Les partis de la coalition Arc-en-ciel veulent constituer leur propre liste et
faire élire leurs propres députés», a-t-il dit, indiquant qu’il était prêt à accueillir les membres de cette coalition dans sa liste.
«Nous n’excluons rien. Nous sommes un parti ouvert, qui veut s’allier avec tout le monde. Nos portes sont
ouvertes à tout parti qui voudra nous rejoindre. Tous ceux qui veulent aller avec nous aux législatives sont les bienvenus. Cela nous permettra d’avoir une grande force et de mettre en place un
puissant groupe parlementaire de l’opposition», a indiqué M. Diallo, qui a rappelé que lui et Alpha Condé avaient, à la veille du second tour, l'intention de constituer un gouvernement d’union
nationale.
Selon lui, «je n’ai pas de contacts particuliers avec le président Condé, depuis son élection. A propos du
gouvernement d’union, je n’ai rien demandé et il ne m’a rien promis. Nous en sommes là, pour le moment».
A propos de ce gouvernement, M. Diallo pense qu’il est déjà trop tard; «on a dépassé cette étape, car son
gouvernement est déjà constitué et a commencé à travailler. Moi, j’ai décidé de jouer mon rôle d’opposant crédible. Je veux une opposition qui critique quand cela est nécessaire et qui propose
quand il le faut. C’est le rôle d’une opposition crédible, digne de ce nom et démocratique».